Sélectionner une page

Humour, les managers mentent ils ?

lundi 4 novembre 2013

Humour, les managers mentent ils ?

les managers mentent ils

Qui ne s’est jamais tiré les cheveux au moment de choisir la formule de politesse à placer en toute fin de courrier? 

J’ignore quelle est votre pratique de la chose. Je confesse pour ma part un double penchant en la matière, romantique et coupable : l’outrance et l’épanchement. Grands dieux, je ne demande qu’à progresser sur la voie de la sobriété mais surtout de l’exactitude, sans parler de la justesse ! C’est l’objet de cette petite chronique à vocation thérapeutique, à laquelle vous êtes cordia… à laquelle vous êtes invités.

Bref et indigent état des lieux 

Cordialement : l’expression remonte à 1393 et signifie rien moins que « de tout son cœur ». Je vous laisse un instant visualiser avec effroi le visage des personnes auxquelles vous vous êtes parfois adressé « de tout votre cœur ». En aviez-vous précisément l’intention ? Mention spéciale si vous avez ajouté « bien » devant cordialement, comme si tout votre cœur n’était déjà pas suffisant.

Bien à vous : il se porte très bien en ce moment. J’ai longtemps succombé à son petit accent médiéval. Certains considèrent qu’il est une forme de bénédiction : « je vous souhaite du bien » ; d’autres l’envisagent plutôt comme une posture d’immolation personnelle : « je me donne à vous ». C’est peut-être concevoir le service de manière un chouya radicale. Au final, bien à vous n’est en fait que la traduction du « yours sincerely» de nos cousins d’en face, davantage connus pour leur flegme (maitrise de l’humeur), que pour leur sens de l’effusion personnelle.

Respectueusement : chacun sait, hélas, combien la notion est aujourd’hui galvaudée.  Pour vouer du « respect » à quelqu’un aujourd’hui, il faut, au choix, être supposément vieux jeu, ou, au contraire, porter une casquette de baseball de traviole, une grosse chaine en or avec en pendentif le logo d’une marque de voitures de luxe, et manier la rime riche.« La confiture sur le mur obscur, qui se fissure à toute allure, je te l’assure, c’est de la confiture de mûre. » Yo, respect. Fermez le ban.

Sincèrement : ah mais ce serait magique (et sans doute un peu carnavalesque) si nous étions tous sincères ! L’étymologie du mot vous intriguera peut-être autant que moi. Sincère vient du latin sincerus qui veut dire « une seule pousse », c’est-à-dire sans mélange, entier. (Raison pour laquelle je mets une option là-dessus : l’unité de la personne, c’est le défi de ce siècle).

Dévouement : si vous vous dites dévoué, c’est que vous prétendez être disposé à TOUT faire pour vous rendre agréable à votre interlocuteur, voire à vous consacrer à lui. Remontez donc vos manches. Allez, mieux que ça !

Agréer : les formules qui prient de croire ou d’agréer s’avèrent aujourd’hui aussi périlleuses que les agrès du gymnase. Assez peu commode de retomber sur ses pieds. Ou alors, il faut aimer rester à cheval. Simplifions, simplifions !

Salutations : elles se doivent d’être  distinguées, ce qui achève de faire tomber l’expression dans le plus pur flou artistique. En quoi se distinguent-elles des autres ? Vos correspondants ont au moins toute la nuit pour y réfléchir.

Sentiments : mais vous êtes fous ! Des sentiments en 2013 ? Vous en seriez capables ? Rappelez-vous que vous êtes nés pour faire votre devoir, des affaires, et, pour faire encore bonne mesure, la gueule aux autres.

Amicalement : votre téléphone sonne au beau de milieu de la nuit. Quelqu’un a besoin de vous, quelque part, là, tout de suite. Si vous ne sortez pas du lit à la seconde, sortez donc « amicalement » des courriers que vous adressez à ce trouble-fait.

pinocchioQue penser après ce petit tour de piste ? Eh bien que nos habitudes lexicales importent peu. L’essentiel tient surtout à une question toute bête : comprenons-nous bien le sens des formules que nous employons et ce à quoi elles nous engagent effectivement ? Tenons-nous leur promesse ? Pour de vrai, comme disent les enfants. Prenons nous notre propre langue au sérieux ? Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde, écrivait Platon.

Il y a sans doute plus de violence dans une formule dépouillée ou détournée de sa vocation, pour compenser, déguiser, flatter, mentir ou méprendre, que dans des propos authentiquement désagréables ou franchement rudimentaires. Il faudrait parfois savoir finir une lettre sans d’autre forme de procédé ou par un « furieusement », un « je vous prie de croire dans les sentiments que je vous dois » (entendez : aucun). « Espèce de voyou » aurait sans doute son petit effet. Zou, vous avez carte blanche !

Certaines personnes peuvent ainsi être d’une politesse remarquable et se montrer capables de comportements vulgaires ou tout à fait ignobles. Les blessures qu’ils infligent sont deux fois plus redoutables. L’essence même du mal émane souvent du raffinement qui l’accompagne. La beauté du diable est bien connue. Sa politesse l’est beaucoup moins.  Ce qui prouve que la politesse n’est pas au cœur du sujet. Ce qui s’y trouve, ça n’est qu’une chose : l’adéquation entre le dire et l’agir.

Les Anglais ont un verbe fabuleux pour nommer ce lien mystérieux, to mean. Il est issu du Vieux Saxon « menian » qui exprime à lui seul trois notions sœurs : avoir l’intention, signifier et faire savoir.

Toute parole bien comprise, fut-elle « de politesse » nous oblige véritablement de l’intérieur. Faute d’avoir trouvé celle qui vous convient, pourquoi ne pas en inventer une qui vous soit propre ? A l’heure du branding personnel, ce serait du meilleur effet, n’est-ce pas ? L’aristocratie a lancé la mode il y a quelques siècles. Quelques familles sont coûte que coûte demeurées fidèles à leur devise. D’autres ont préféré donner dans le « bizness » en conjuguant le terme au pluriel.

En conclusion, aux yeux du nombre, la formule de politesse relève vaguement de la consigne, de la caution ou de la coquetterie. Rien ne nous empêche de ne plus en employer si nous nous efforçons de vivre de manière telle qu’il ne puisse y avoir aucun doute au sujet de nos intentions véritables. And I mean it.

les managers MPM Humour

N’oubliez pas : on ne guérit pas si facilement !

Bertrand Leblanc-Barbedienne

Articles conseillés

Quelques lignes de bonheur pour les managers en 2023 et après

C’est un fait, les managers les plus impactants passent plus de temps sur le pour-quoi (finalité ou causalité des choses) que sur le comment (modalités des process ou autres). Cela signe la quête de #sens dont toute motivation se nourrit. Alors pour aimer son job de...

Quelle promesse pour la société de demain ? Business case pour la campagne présidentielle !

Notre recherche de liberté se retrouve (provisoirement) dans une impasse ! Depuis la chute du mur de Berlin, un vent de (soi-disant) liberté souffle sur le monde et ce vent est incarné par le marché d’une part (la liberté économique) et la démocratie d’autre part (la...

Management des organisations : Regard critique sur l’engagement des équipes

En management comme ailleurs, le confort endort ! On le sait tous, le confort est un matelas sur lequel on s’endort alors que la contrainte est souvent  un ressort sur lequel on rebondit. Cette réalité explique que l'intelligence collective s'exprime surtout face aux...

Management, planification et synchronisation : La valse à 3 temps

Plus un système devient complexe et moins il devient prédictible dans le temps. C’est le point commun entre la météo (le temps est de plus en plus incertain) et le management des organisations (prévoir ce qui va se passer dans le temps est de plus en plus difficile)....

Sociologie : Quelques exemples d’évolution des valeurs sociétales

De l’unité à l’unicité : le management de nos vies change de finalité Dans la société, comme dans les entreprises, le polythéisme des valeurs est de plus en plus patent. A l’unité d’hier se substitue en tout et partout l’unicité. Dit autrement, les blocs homogènes se...

Et si nous acceptions enfin l’incertitude !

Nous vivons dans un monde CIA - Complexe, Incertain et Ambigu et c’est pour cela que notre niveau de maitrise devient très relatif. Cette incertitude peut aller jusqu’à la peur : La peur de manquer, la peur de l’étranger, la peur du déclassement, la peur de...

Vers un changement de paradigme des compétences

      Le management des compétences navigue aujourd’hui entre tension et crispation. Le rêve de toute organisation dans une période de changements est de voir une vraie rupture dans la façon de faire et dans la façon d’être de ses collaborateurs. Ce...

Comment bien vieillir malgré tout?

Comment bien vieillir malgré tout ? Regard décalé sur une certaine Sagesse*. Mieux vaut être en travaux plutôt qu’un produit fini ! Voilà une bonne résolution pour bien vieillir. La caractéristique de ce qui est vivant est de se transformer. Le parti pris de la...

Parfums d’été

Parfums d’été Le management, au fond, c’est réaliser des choses extraordinaires à partir de choses ordinaires grâce à des managers à la fois vrais et hors normes. Six parfums composent l’alchimie de ce type de leadership : un parfum de noblesse dans l’intention, un...

Chef, digitalise-moi

Chef, digitalise-moi ! L’Homme est devenu le maillon faible de son espace-temps Le digital est une révolution technologique et un tsunami managérial. Pour la première fois de son histoire, l’homme est en effet devenu le maillon faible de son espace-temps. Ce n’est...

Management des organisations : Réflexion de fond sur le pilotage de la performance

Management des organisations : Réflexion de fond sur le pilotage de la performance En management, comme ailleurs, le problème n'est pas de piloter l’activité à l’aide d’indicateurs clés ou de révolutions technologiques X ou Y. Le vrai problème est de savoir si les...

Peut-on (encore) faire confiance au progrès technologique ?

Peut-on (encore) faire confiance au progrès technologique ? Ce début de XXI siècle est décidément un mélange très tumultueux entre des promesses de progrès inimaginables au XX siècle et des stigmates très persistants du « vieux monde » comme disent certains....

Le management peut-il réinventer l’espace-temps du travail ?

Lieux et liens au travail sont très cloisonnés. Le contrat de travail prévoit un lieu de travail précis mais ne prévoit aucun lien précis entre les personnes sauf des liens hiérarchiques. Le management peut-il réinventer le temps et l’espace économique ?

Dé-chainez-vous !

Dé-chainez-vous, cela fait un bien fou ! La liberté, çà ne se donne pas, ça se gagne… On ne naît pas libre, on n'est pas libre, on le devient et le chemin pour le devenir passe par un difficile et long travail intérieur à mener sur trois voies parallèles : la clarté...

le grand virage des managers

Pourquoi avons-nous besoin de nouveaux managers dans le paradigme en devenir ? La finalité d'une entreprise n'est ni de créer de l'emploi, ni d'enrichir ses actionnaires. La finalité d'une entreprise est de créer de la valeur d'usage et d'enrichir ses savoir-faire....

Management des organisations : Il est temps d’être « politiquement incorrect » !

Management des organisations : Il est temps d’être « politiquement incorrect » ! Technologiquement, on a déjà inventé l’entreprise de demain. Tout le monde peut s’en apercevoir pour le pire et le meilleur. En revanche, humainement parlant, on peine à trouver de...

Sérendipité ou l’art d’avoir de la chance

Sérendipité ou comment saisir les opportunités dans un monde devenu imprévisible ? La sérendipité est un mot à l’histoire singulière. Sur le plan phonétique, il n’a ni le charme ni l’usage commun de son homologue anglais (serendipity). Le sens le plus profond de ce...

Place de l’intuition dans le management des entreprises en période d’incertitude

"Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas". Cette célèbre citation signifie-t-elle un abandon de la raison, une incitation à une irrationalité ou encore plaide-elle pour un antirationalisme ? Non pas tout du tout. Il ne s'agit pas de cela. Il s'agit juste de...

La FéminiTé, une parfaite illustration des années en Té…qui nous attendent

Chacun le constate au quotidien : Le monde devient turbulent, effervescent voire violent. Nous vivons, irrésistiblement et irréversiblement, le passage d’un monde à un autre. Nous vivons aussi, plus ou moins douloureusement, le passage d’une logique à une autre avec à...

Les big data de la motivation

Big data de la motivation La motivation : un bien précieux en période de saturation La plupart des entreprises et des organisations sont confrontées à  un changement de modèle économique. A ces profonds changements, potentiellement déstabilisants pour les...

MPM TV

Abonnez-vous à notre newsletter