So Happy* 1ère partie
Chez les So Happy, le temps ne fait pas que passer, il sédimente
Au moins depuis que la vie existe, le temps ne fait pas que passer, il sédimente ! Cette accumulation est à l’origine d’une mémoire entre les différentes époques. Ainsi, une époque ne se construit pas contre une autre. Un paradigme ne remplace jamais totalement le précédent. Une nouvelle ère est toujours une émergence des précédentes qui vient sublimer, transcender et dépasser les limites et les impasses des précédentes. Pour les messagers humains que nous sommes, ces émergences successives ont toujours tendance, par accomplissement successifs, à explorer et exploiter tous les possibles. Explorer et exploiter tous les possibles, tout en étant conscient de ses propres limites et de ses propres impasses, voilà une différence fondamentale entre les gens heureux et les autres pendant les périodes de ruptures, de changements ou de bascules que la vie nous propose inévitablement.
So Happy, préparons-nous : le monde d’après se profile sous l’effervescence !
A l’évidence un monde s’estompe sous nos yeux. Nous vivons la fin d’un monde mais pas la fin du monde. Comme toujours, une époque chasse l’autre avec une période plus ou moins longue de transition. Nous sommes précisément dans cette période de transition. La prochaine époque sera à la fois un héritage de toutes celles qui précèdent avec un saut de complexité faisant émerger quelque de chose de nouveau.
Quelque chose de nouveau éveille les So Happy. Quelque chose nouveau certes mais quoi ?
Il est évidemment impossible de répondre à cette question avec certitude puisque par nature l’avenir est imprévisible, imprédictible et n’obéit à aucun déterminisme. Observons simplement les intentions dans le champ des possibles selon la sédimentation et les accumulations observées au fil du temps.
L’espace-temps se ré invente tous les 500 ans environ et ça tombe toujours sur les So Happy!
L’espace-temps est réinventé tous les 500 ans environ à travers un nouveau et grand projet collectif. Tous les 500 ans environ, la civilisation européenne a toujours eu un étalon du pouvoir, une valeur sur laquelle elle décline son intelligence collective. Ce pouvoir et cette valeur sont souvent déclinés philosophiquement, politiquement et économiquement autour d’une raison de vivre et à travers un grand projet collectif.
Chez les grecques c’était la Sagesse. C’est l’époque des penseurs qui en conscience harmonisent tout souvent idéalement…
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Chez les romains c’était l’Ordre. C’est l’époque des empereurs qui régente et organise tout souvent avec force…
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Chez les goths c’était le Divin. C’est l’époque des moines qui intériorise et spiritualise tout souvent avec culpabilité
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Chez les Féodaux, c’était le Salut. C’est l’époque des seigneurs qui se révoltent et qui sonnent le réveil de la vie souvent avec férocité.
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Chez les Modernes, c’était la Liberté. C’est l’époque des humanistes qui veulent libérer l’homme de la Nature d’où l’intensification, des tyrans d’où la démocratisation, du mystique d’où le cartésianisme, de la sagesse d’où la libération des mœurs et de lui-même d’où l’égalitarisme.
Après le progrès matériel, les So Happy viseront le progrès existentiel !
Quelle sera notre prochaine raison de vivre au moment ou le modernisme se meurt politiquement avec des états nation économiquement exsangues et une logique du profit à tout prix à bout de souffle philosophiquement ? Rappelons que la modernité avait conçu un vaste projet : la libération de l’homme par le progrès ou si vous préférez le progrès de l’Homme par sa libération. Au vue des nombreuses chaines qui continuent à nous emprisonner dans nos vies respectives, force est de constater que ce progrès fut beaucoup plus matériel qu’existentiel. Tout s’est déroulé comme si la grande libération annoncée avait surtout développé une insatiable cupidité qui est aujourd’hui encore le moteur principal de notre système socioéconomique. La cupidité est le désir d’acquérir, de posséder et d’accumuler. Disons-le sans détour, l’homme moderne est foncièrement cupide. Il est dès lors inutile de chercher à l’en détourner en lui faisant la morale. Pour le prochain moteur du prochain paradigme socioéconomique, l’idée n’est donc pas de tuer le désir mais d’en changer la cible. Nous devons donc imaginer pour notre prochain espace-temps, une raison de vivre qui deviendrait plus impérieux que la cupidité au point de la détrôner en s’appuyant sur les deux points faibles de la cupidité :
1er point faible : pour posséder beaucoup, il faut soit travailler beaucoup, soit prendre d’énormes risques (plus ou moins légaux), soit les deux. Bien évidemment, l’un et/ou l’autre de ces deux facteurs diminue(nt) d’autant le temps et le plaisir que l’on a pour jouir de ce que l’on possède.
2ème point faible : la possession attise la convoitise et augmente le risque de se faire voler surtout quand la fiscalité et la délinquance augmentent !
L’idée du prochain paradigme se dessine donc à travers le deal suivant : Posséder moins (mais peut être mieux ?) pour jouir plus et se faire moins démunir ! De quoi pourrait-on donc bien jouir intensément sans forcément se tuer au travail, sans prendre de risques inconsidérés et sans risque de se le faire voler ? RÉPONSE : la joie de vivre.
La joie de vivre : le moteur des So Happy de demain
Pour faire un peu de prospective sur cette notion de joie de vivre, il est nécessaire de rappeler les 3 axes de l’accomplissement pour imaginer comment les messagers humains que nous sommes vont se développer et se comporter. Tout processus pour réussir à s’accomplir a besoin de développer des ressources, des modèles (ou des normes) et de l’activité sous peine de s’éteindre et de disparaitre. Ces besoins existent aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du processus. Notre accomplissement va donc dépendre de l’utilisation que nous faisons de nos ressources internes et externes, des modèles de vie internes et externes que nous concevons et de la nature de nos activités internes et externes. Balayons les possibles et surtout les souhaitables pour chacun des axes en interne et en externe.
1er axe : Utilisation des ressources
Ressource externe : C’est l’écologie personnelle. Avant d’être un mouvement politique, l’écologie est une science qui s’intéresse à l’optimisation des échanges. Cette écologie personnelle est à construire pour chacun de nous. Le spectre de cette écologie personnelle se situe entre voracité pour tout et anorexie en tout. Entre ces 2 extrêmes vient-la notion de frugalité c’est-à-dire l’idée de faire juste ce qu’il faut ou beaucoup mieux avec beaucoup moins…
Ressource interne : C’est l’exploitation de nos talents, de nos capacités et de nos compétences physiques et mentales. Le spectre de cette exploitation se situe entre génie et médiocrité. Entre ces 2 extrêmes vient la notion d’Excellence c’est-à-dire faire mieux que bien ce que nous avons à faire en cultivant ses territoires d’excellence.
2eme axe : les modèles de vie
En externe : c’est l’éthique personnelle. Le spectre de cette éthique va du voyou au saint. Entre ces 2 extrêmes vient la notion d’Élégance pour illustrer que quelle que soit son Éthique personnelle, l’important est de faire de belles et de bonnes choses pour le bien commun.
En interne : c’est l’hygiène de vie. Le spectre se situe entre privation et excès. Entre ces 2 extrêmes vient la notion de simplicité c’est-à-dire toujours choisir le modèle le plus efficace et le plus léger possible pour éviter toute lourdeurs et toutes complications inutiles.
3ème axe : la nature des activités
En externe : c’est saisir les opportunités c’est-à-dire exploiter, explorer, s’adapter, improviser…Toute la logique de ces actions se situent entre focalisation et dispersion. Entre ces 2 extrêmes il y la notion de fécondité pour assurer la plus grande cohérence possible.
En interne : c’est le projet de vie. Ce projet se situe entre haut et bas et petit et grand. Entre ces 2 extrêmes vient la notion de noblesse pour illustrer que l’important n’est pas de viser loin ou de viser haut. L’important est que le projet est du sens et de la valeur par rapport à ses ressources et son modèle de vie.
Dans un second article, nous analyserons comment cette joie de vivre structurera l’espace-temps postmoderne et comment en pratique elle se déclinera dans la vie quotidienne des So Happy.
* d’après le « Petit traité de la joie de vivre » de Marc Halévy Editions Dangles