Sélectionner une page

Gouvernance des entreprises : Le management peut-il se libérer de ses idéologies ?

dimanche 4 novembre 2018

Gouvernance des entreprises : Le management peut-il se libérer de ses idéologies ?

En management comme ailleurs, le système est contesté !

En management, comme ailleurs, toute naissance d’un nouveau paradigme s’accompagne d’une hétérodoxie stigmatisée. L’esprit libre de certains pionniers sensibles à l’air du temps représente, pour les gardiens du temple, une sorte de corruption. Court-circuiter les dogmes, les conventions ou encore les certitudes est souvent un crime dans l’univers de l’entreprise « feutrée » où tout a été homogénéisé, rationalisé et « process-isé ». S’attaquer à « la machinerie », simplement en la questionnant, c’est s’attaquer à la raison d’être du système mis en place pour maitriser et dominer son environnement. Le sens de ce système a été conçu comme un sens unique : Top-Down : La direction décide, les soldats exécutent et les tableaux de bord tracent (souvent aveuglément) l’exécution. En réaction à ce système, certains managers « hors la loi » se rebiffent. Là où le système hachait la vie de l‘entreprise mécaniquement, ces aventuriers du management tentent de faire émerger des tranches de vie organiquement en incorporant tous les ingrédients vitaux et souvent contradictoires de la sève d’une entreprise : la raison et la passion,  la durée et l’intensité, l’enjeu et le jeu, le progrès et les regrets, l’ordre et le désordre, l’harmonie et le conflit…

En réaction à cette contestation, le système tente de tout verrouiller

Evidemment, tous les va et vient de ces ingrédients vitaux sont assez incompatibles avec le sens unique proposé par le système top-down encore en place. Cette incompatibilité provient de l’arrogance de son management prétendant, sur le papier, canaliser les torrents de plus en plus tumultueux de la pratique. Malgré les alertes assez nombreuses pour souligner la portée un peu étriquée de ce sens unique, l’obstination règne pour sauver le système. Ainsi, après l’espoir quelque peu déçu de la réduction du réel à une machine mécanique pendant l’ère industrielle, notre époque vit une autre tentative de réduction du réel, cette fois, à une machine numérique. Tous ces « penseurs » industriels puis « numériques » ne veulent pas comprendre que le réel n’est ni mécanique ni numérique. Sans surprise donc et de manière assez pragmatique, le nouveau paradigme managérial qui fleurit çà et là, répond à cette arrogance technique par une modestie critique dans l’approche des situations. La carte n’est pas le territoire comme dirait l’autre. Le management n’est ni une équation mathématique ni un programme informatique. Les managers se tirent une balle dans le pied et épuisent leur équipe en continuant de préférer une intelligence assistée par ordinateur à une intelligence crée « in situ » par les initiatives humaines. C’est précisément cette prise de conscience qui éveille actuellement une sensibilité managériale renouvelée et ré-enchantée.

Le chef cherche à avoir raison tout seul. Le leader cherche une raison d’être-ensemble

Cette sensibilité pour repérer et analyser le pluriel du réel caractérisera le leader de demain. Cette pensée nouvelle est souvent considérée comme quelque peu anomique et hétérodoxe, toujours à contrecourant de la bienpensance dogmatique. Elle se permet, en effet, de la relativiser au profit d’une pratique privilégiant les singularités aux généralités. Il est surprenant de constater que ce pragmatisme managérial rend parfois hors la loi, aux yeux des dépositaires du système, ces managers renifleurs et agitateurs. Il n’en reste pas moins, qu’avec courage,  quelques pionniers poursuivent pas à pas leur œuvre. Le paradoxe de l’histoire est que la fécondité de ces nouvelles approches est parfois récupérée par le système et tend donc à le renforcer. En se conduisant en mécréant du management, ces leaders tracent de nouvelles voies et participent, chemin faisant, à une avancée progressive à travers le clair-obscur de l’art managérial. Pour caractériser d’un mot cette progression disons que le chef (le manager de l’ancien paradigme) cherchait à avoir raison tout seul alors que le leader (l’animateur du nouveau paradigme) cherche « une raison d’être ensemble » : Deux époques, deux démarches, deux métiers, forcément incomparables !

Le management de demain refondera l’idée d’humanisme…

Quand on est aveuglé par ses certitudes, savoir c’est parfois se faire avoir. Le temps d’une refondation du management est venu. Ce n’est plus le gros qui manage le petit. Aujourd’hui c’est l’agile qui mange l’inerte. Pour relayer cette volonté d’agilité, le rôle social de l’entreprise sera d’abord et avant tout de favoriser l’initiative individuelle et collective en devenant le lieu d’une alliance entre un engagement individuel et une promesse collective. Dans cette hypothèse, le management deviendra lui aussi une alliance c’est-à-dire un pacte mené avec tact. Être un humaniste, c’est d’abord faire confiance à l’autre pour s’assumer et prendre ses responsabilités. C’est donc un choix en faveur de l’humain et de son génie. Pour défendre cet humanisme-là, il est nécessaire, d’accepter l’idée que de se remettre en cause et faire preuve de confiance en soi vont de pair. Malheureusement, le dogme est un mélange préfabriqué de raison et de foi et, pour l’instant, les élites préfèrent encore sauver la face que de perdre confiance dans le système. Dans la majorité des cas, cette rectitude retarde les évolutions nécessaires de l’entreprise et de ses modes d’organisation et de gouvernance.

Une charte d’entreprise en trois articles pour reconnaitre le leader de demain

Plutôt que de renouveler leur vision, certains managers préfèrent se réfugier dans l’illusion. Au fond, dans les entreprises comme ailleurs, il y a ceux qui mise sur l’évidence et ceux qui misent sur les croyances. Le présent et la réalité sont les deux moteurs des premiers pour faire émerger de vrais changements basés sur de vrais fondements. Les promesses et ses mythes sont les deux flotteurs des seconds pour sauver un système usé et saturé. Celles et ceux qui misent encore sur des croyances surannées souhaitent toujours être les meilleurs du monde croyant toujours tout dominer. Celles et ceux qui misent sur l’évidence se contentent simplement d’être meilleurs pour le monde.

Cet ajustement d’ambition est plein de sagesse. Pour conclure, esquissons une réel et nouvelle gouvernance des entreprises en une charte en trois articles :  

Article 1 : L’entreprise a pour vocation de générer, en interne, une qualité de vie durable sans utopie ni nostalgie

Article 2 : La qualité de vie générée en interne doit permettre à l’entreprise de générer en externe des produits et/ou des services avec une forte valeur d’usage pour ses clients.

Article 3 : Le règlement intérieur de l’entreprise doit répondre à une question essentielle « On est ensemble pour quoi faire ? et doit ensuite laisser à chacun la liberté et la responsabilité de servir cette vocation

Articles conseillés

Quelques lignes de bonheur pour les managers en 2023 et après

C’est un fait, les managers les plus impactants passent plus de temps sur le pour-quoi (finalité ou causalité des choses) que sur le comment (modalités des process ou autres). Cela signe la quête de #sens dont toute motivation se nourrit. Alors pour aimer son job de...

Quelle promesse pour la société de demain ? Business case pour la campagne présidentielle !

Notre recherche de liberté se retrouve (provisoirement) dans une impasse ! Depuis la chute du mur de Berlin, un vent de (soi-disant) liberté souffle sur le monde et ce vent est incarné par le marché d’une part (la liberté économique) et la démocratie d’autre part (la...

Management des organisations : Regard critique sur l’engagement des équipes

En management comme ailleurs, le confort endort ! On le sait tous, le confort est un matelas sur lequel on s’endort alors que la contrainte est souvent  un ressort sur lequel on rebondit. Cette réalité explique que l'intelligence collective s'exprime surtout face aux...

Management, planification et synchronisation : La valse à 3 temps

Plus un système devient complexe et moins il devient prédictible dans le temps. C’est le point commun entre la météo (le temps est de plus en plus incertain) et le management des organisations (prévoir ce qui va se passer dans le temps est de plus en plus difficile)....

Sociologie : Quelques exemples d’évolution des valeurs sociétales

De l’unité à l’unicité : le management de nos vies change de finalité Dans la société, comme dans les entreprises, le polythéisme des valeurs est de plus en plus patent. A l’unité d’hier se substitue en tout et partout l’unicité. Dit autrement, les blocs homogènes se...

Et si nous acceptions enfin l’incertitude !

Nous vivons dans un monde CIA - Complexe, Incertain et Ambigu et c’est pour cela que notre niveau de maitrise devient très relatif. Cette incertitude peut aller jusqu’à la peur : La peur de manquer, la peur de l’étranger, la peur du déclassement, la peur de...

Vers un changement de paradigme des compétences

      Le management des compétences navigue aujourd’hui entre tension et crispation. Le rêve de toute organisation dans une période de changements est de voir une vraie rupture dans la façon de faire et dans la façon d’être de ses collaborateurs. Ce...

Comment bien vieillir malgré tout?

Comment bien vieillir malgré tout ? Regard décalé sur une certaine Sagesse*. Mieux vaut être en travaux plutôt qu’un produit fini ! Voilà une bonne résolution pour bien vieillir. La caractéristique de ce qui est vivant est de se transformer. Le parti pris de la...

Parfums d’été

Parfums d’été Le management, au fond, c’est réaliser des choses extraordinaires à partir de choses ordinaires grâce à des managers à la fois vrais et hors normes. Six parfums composent l’alchimie de ce type de leadership : un parfum de noblesse dans l’intention, un...

Chef, digitalise-moi

Chef, digitalise-moi ! L’Homme est devenu le maillon faible de son espace-temps Le digital est une révolution technologique et un tsunami managérial. Pour la première fois de son histoire, l’homme est en effet devenu le maillon faible de son espace-temps. Ce n’est...

Management des organisations : Réflexion de fond sur le pilotage de la performance

Management des organisations : Réflexion de fond sur le pilotage de la performance En management, comme ailleurs, le problème n'est pas de piloter l’activité à l’aide d’indicateurs clés ou de révolutions technologiques X ou Y. Le vrai problème est de savoir si les...

Peut-on (encore) faire confiance au progrès technologique ?

Peut-on (encore) faire confiance au progrès technologique ? Ce début de XXI siècle est décidément un mélange très tumultueux entre des promesses de progrès inimaginables au XX siècle et des stigmates très persistants du « vieux monde » comme disent certains....

Le management peut-il réinventer l’espace-temps du travail ?

Lieux et liens au travail sont très cloisonnés. Le contrat de travail prévoit un lieu de travail précis mais ne prévoit aucun lien précis entre les personnes sauf des liens hiérarchiques. Le management peut-il réinventer le temps et l’espace économique ?

Dé-chainez-vous !

Dé-chainez-vous, cela fait un bien fou ! La liberté, çà ne se donne pas, ça se gagne… On ne naît pas libre, on n'est pas libre, on le devient et le chemin pour le devenir passe par un difficile et long travail intérieur à mener sur trois voies parallèles : la clarté...

le grand virage des managers

Pourquoi avons-nous besoin de nouveaux managers dans le paradigme en devenir ? La finalité d'une entreprise n'est ni de créer de l'emploi, ni d'enrichir ses actionnaires. La finalité d'une entreprise est de créer de la valeur d'usage et d'enrichir ses savoir-faire....

Management des organisations : Il est temps d’être « politiquement incorrect » !

Management des organisations : Il est temps d’être « politiquement incorrect » ! Technologiquement, on a déjà inventé l’entreprise de demain. Tout le monde peut s’en apercevoir pour le pire et le meilleur. En revanche, humainement parlant, on peine à trouver de...

Sérendipité ou l’art d’avoir de la chance

Sérendipité ou comment saisir les opportunités dans un monde devenu imprévisible ? La sérendipité est un mot à l’histoire singulière. Sur le plan phonétique, il n’a ni le charme ni l’usage commun de son homologue anglais (serendipity). Le sens le plus profond de ce...

Place de l’intuition dans le management des entreprises en période d’incertitude

"Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas". Cette célèbre citation signifie-t-elle un abandon de la raison, une incitation à une irrationalité ou encore plaide-elle pour un antirationalisme ? Non pas tout du tout. Il ne s'agit pas de cela. Il s'agit juste de...

La FéminiTé, une parfaite illustration des années en Té…qui nous attendent

Chacun le constate au quotidien : Le monde devient turbulent, effervescent voire violent. Nous vivons, irrésistiblement et irréversiblement, le passage d’un monde à un autre. Nous vivons aussi, plus ou moins douloureusement, le passage d’une logique à une autre avec à...

Les big data de la motivation

Big data de la motivation La motivation : un bien précieux en période de saturation La plupart des entreprises et des organisations sont confrontées à  un changement de modèle économique. A ces profonds changements, potentiellement déstabilisants pour les...

MPM TV

Abonnez-vous à notre newsletter