Management des organisations : Survol d’une métamorphose en cours
Management hiérarchique : Dernière ligne droite avant le crash ?
Avec la longue agonie du management hiérarchique, le grand défi des leaders de demain sera de réconcilier pouvoir et autorité. Toute la crédibilité du management de demain se jouera en effet dans la cohérence entre ce qu’il montre et ce qu’il est vraiment. C’est au prix de cet alignement que l’on pourra à la fois prendre le pouvoir et faire autorité. En attendant, nous sommes dans une période de transition où les rôles sont souvent distincts : Les uns prennent plutôt le pouvoir sans faire autorité tandis que d’autres font autorité sans réellement prendre le pouvoir. Comme toujours en période de mutation, pour avancer, il faut prendre du recul en posant cette question : Au fond, par quoi se caractérise une période de transition ? La simple observation de notre époque nous donne des indices. A l’évidence, une période de transition est une époque où quelque chose se meure sans qu’autre chose naisse vraiment. C’est ce qui explique qu’il existe encore aujourd’hui un management très hiérarchique, même s’il entraine une déperdition d’énergie et d’information induite par une désolidarisation des échelons. Une période de transition se caractérise aussi par un système qui essaie encore de sauver la face par la mise en place d’artifices malgré une perte de confiance. Concernant les entreprises, la grande mode c’est le management par les valeurs.
Management vertical : Les tours d’ivoire ne contrôlent plus grand-chose !
La perte de confiance dans un système quel qu’il soit ne vient jamais par hasard. En l’occurrence, le management vertical a péché par arrogance avec sa vue surplombante et agaçante pour celles et ceux qui sont « au fond de la mine en train de tirer les wagonnets ». Les deux péchés d’orgueil du système Top-Down ont été 1/ de croire que ceux qui font les meilleures études sont les plus intelligents et 2/ de croire que les élites, sorties de nos meilleures écoles, prennent de meilleures décisions que les autres. Les organisations sont devenues bien trop complexes pour se contenter de ces deux seules croyances qui ont simplement fait illusion quand presque tout était encore prévisible, planifiable, mécanique et systématique. Mais quand tout devient imprévisible, organique systémique, la lourdeur, la lenteur et l’aveuglement font que les « tours d’ivoire » ne contrôlent plus grand-chose. Et pourtant, c’est précisément dans ces périodes de tumultes que l’on aurait réellement besoin d’être éclairé. Le paradoxe du management dans la plupart des organisations d’aujourd’hui est que plus grand monde ne comprend à quoi il sert mais la majorité continue d’en surestimer les capacités.
Management des entreprises : Un poison nommé bureaucratie !
Prenons un exemple pour bien illustrer le malaise rampant du management d’aujourd’hui : La bureaucratie. Chacun a déjà pu vérifier le fait suivant : Lorsqu’il n’y a pas de problème, la bureaucratie en invente un pour justifier son existence. Lorsqu’il y a un, elle pond, laborieusement et trop tard, une solution inadéquate qui complique le problème sans le résoudre. Le stade de la bureaucratie est atteint quand la procédure est plus importante que le résultat opérationnel. Ce problème de bureaucratie est aggravé par la « parasitocratie » (ceux qui vivent sur le travail des autres) et qui étouffe la méritocratie. Et pourtant, lorsqu’on vit, non pas dans un modèle mais dans le réel, on s’aperçoit très vite que la complication n’est jamais la bonne réponse à la complexité. Le credo du leader de demain sera d’accepter la complexité et de rejeter la complication. En effet, tout l’art du management est de répondre simplement à des problèmes complexes. Pour réaliser cela, il est inutile de bêler en cœur qu’il faudrait remettre l’humain au centre de l’organisation ( il y est !) mais plutôt œuvrer de toutes ses forces pour remettre l’organisation dans le cœur des humains.
Mais au fond, qu’est ce qui a tant éloigné le cœur des hommes de leur organisation ?
La réponse tient à un mot : l’industrialisation ! L’industrialisation du management a rendu les managers aveugle à tout ce qui n’est pas mesurable et quantifiable, d’où des carences de sens, d’intuition, d’intention, de simplicité, d’harmonie… Une chose est de disposer de tableaux de bord, une autre est de savoir s’en servir pour créer une dynamique. L’idée absurde que « seul ce qui se mesure se manage » a profondément affaibli la puissance du management. Les managers mécaniques pilotent avec des tableaux de bord. Les managers organiques pilotent la vie à bord et ce n’est pas le même métier. Malgré la puissance toujours plus importante des outils de pilotage (les fameux KPIS), la vulnérabilité des entreprises n’a jamais été aussi importante. Alors, comment passer du quantitatif (toujours plus) au qualitatif (toujours mieux) ? Une chose est certaine, quand le quantitatif prend nettement le pas sur le qualitatif, le bien, le beau, le bon disparaissent au profit du beaucoup et de la crise de foi qui va avec !
Le management peut-il dépasser la vieille division entre ceux qui commandent et ceux qui obéissent ?
Pour répondre à cette difficile question, constatons déjà que les relations constructives qui durent ne sont pas les relations où l’on s’engueule le moins mais les relations où l’on s’engueule le mieux. Remarquons ensuite que les vrais managers se méfient de la perfection et ont souvent la capacité de transformer un défaut en une qualité au service de la mission. Au fond, on pourrait se dire que le management est réussi quand les collaborateurs, qui ne travaillent pas pour le plaisir, prennent plaisir en travaillant. Pour cela, il est urgent d’admettre que le sens du travailest forcément autre chose que le travail. Cette évidence pose pourtant encore beaucoup de problèmes aux managers en place. Et pourtant, le temps viendra d’admettre qu’au même titre qu’un marketeur est un professionnel du désir de ses clients, un manager doit être un professionnel du désir de ses collaborateurs pour être ensuite très exigeant dans le management de ce désir. Si le manager d’hier était une force au service de l’ordre, le leader de demain sera une inspiration au service d’une vocation.
Pour conclure….
On le pressent déjà, après une phase industrielle, le management va revenir à une phase artisanale. Nous allons redécouvrir qu’au fond le management c’est comme le bricolage, c’est souvent des problèmes d’ajustements ! En management comme ailleurs, la noblesse ne vient pas de la mission, mais de la manière dont on l’accomplit. Le management retrouvera ses lettres de noblesse si le pensable (l’idée) et le croyable (c’est possible) se mettent de nouveau à resonner. Pour conclure, l’élégance du management de demain sera bien à l’opposé de sa lourdeur d’aujourd’hui et se définira ainsi : Le petit rien qui change tout !